L’expansion de l’épidémie Mpox représente pour le continent africain une préoccupation majeure guidant l’Organisation mondiale de la santé (OMS) à classer cette épidémie dans la catégorie des maladies infectieuses au rang d’urgence. Le 14 août 2024, le directeur général de l’OMS avait lancé une alerte en déclarant l’épidémie de Mpox comme une urgence de santé publique de portée internationale. A ce jour, le Congo a déjà enregistré 22 cas touchés par cette épidémie qui sévit plus en Afrique centrale, notamment en RDC, pays frontalier au Congo. Selon le rapport de l’OMS publié le 23 novembre 2023, ce pays avait enregistré déjà 12.569 cas entre le 1er janvier et le 12 décembre 2023. Frontalier à ce pays, le Congo a lancé vers fin octobre 2024 une mission conjointe Gouvernement-OMS sur le terrain pour apporter une réponse à cette maladie. A ce sujet, le Dr Vincent Dossou Sodjinou, représentant de l’OMS au Congo s’est confié au Journal LA SEMAINE AFRICAINE.
*Quelle est l’évolution de cette mission conjointe?
**Le ministère de la Santé et de la population, avec l’appui technique et financier de l’OMS et de l’USAID, a déployé sur le terrain une équipe multidisplinaire, composée de plusieurs entités, dont les techniciens du ministère en charge de la santé, de l’OMS, du laboratoire national de la santé publique et d’autres partenaires, le long du corridor fluvial. Les objectifs de cette mission sont de renforcer la surveillance pour rechercher les cas suspects de Mpox, faire des tests de confirmation des cas identifiés, appuyer la prise en charge et sensibiliser les populations le long du corridor fluvial. La première mission a pris le départ le 22 octobre 2024 et couvre, actuellement les localités de la Cuvette et des Plateaux. Une deuxième équipe est constituée pour couvrir l’axe de la Likouala et de la Sangha. Cette deuxième équipe prendra départ de Brazzaville dans quelques jours. En ce qui concerne l’évaluation de la première mission, il faut dire que la mission se déroule bien sur le terrain. Quelques cas suspects ont été détectés, mais qui ont été pour la plupart guéris ou négatifs. D’autres cas de maladies ont été détectés et prélevés pour les examens de laboratoire. Dans les localités parcourues, l’équipe sensibilise les populations et les leaders locaux sur la maladie Mpox, mais aussi sur la préparation aux inondations et autres problèmes de santé publique. Nous aurons des rapports plus détaillés et précis au retour de l’équipe prévue dans quelques jours. C’est vous dire en résumé que l’équipe évalue actuellement la situation sur le terrain, renforce la surveillance des cas, sensibilise les communautés et la prévention et apporte un soutien aux équipes locales. Les premiers résultats montrent une amélioration de la détection des cas et une mobilisation accrue des acteurs de santé locaux.
*Est-ce qu’il n’y a pas d’autres cas au Congo, hormis les 22 connus, au regard de l’ampleur de cette épidémie?
**Votre question est justifiée. Au regard de notre proximité avec la RDC, on est bien en droit de se demander s’il n’y a pas des cas détectés. C’est entre autres pour répondre à cette question que le ministère en charge de la santé a déployé des équipes tout le long du corridor fluvial. Les premiers constats qui remontent du terrain tendent à nous apaiser et à nous rassurer. Ce qui est important, c’est de renforcer la surveillance et de rechercher activement les cas suspects. Et, c’est ce que le Gouvernement fait avec l’appui de l’OMS, de l’USAID, CDC Afrique, UNICEF et les autres partenaires. Je tiens à vous dire qu’au – delà des 22 cas confirmés, le pays a notifié plus de 200 cas suspects qui sont revenus négatifs après les examens de laboratoire. Cela nous rassure que le système de surveillance fonctionne et détecte les cas malgré qu’il y ait quelques améliorations à apporter et sur lesquelles le Gouvernement travaille.
*Comment peut-on se protéger contre cette maladie?
**Pour se protéger contre le Mpox, il est essentiel de respecter les recommandations suivantes : – Hygiène des mains : Lavez-vous régulièrement les mains avec de l’eau propre et du savon, utilisez des solutions hydro alcooliques. Si le savon n’est pas disponible, vous pouvez également utiliser de la cendre. – Eviter les contacts avec les animaux : Evitez tout contact non protégé avec les animaux sauvages, en particulier ceux qui semblent malades ou morts.- Prévenir les contacts humains : Evitez tout contact physique et sexuel avec des personnes infectées par le Mpox, notamment celles présentant des symptômes tels que des éruptions cutanées. Cela inclut la prudence vis-à-vis des fluides corporels tels que le sang, les urines, la salive, les selles, les vomissures, la sueur et le sperme. Et enfin – Manipulation des objets : ne manipulez pas les objets ou les linges utilisés par les personnes malades pour réduire le risque de transmission.
*Quels sont les moyens que déploie l’OMS face à cette épidémie, surtout dans la surveillance et les aspects liés au laboratoire?
**Depuis le début de l’épidémie, l’OMS soutient activement le Gouvernement pour la riposte à l’épidémie de Mpox. Cet appui se fait sur plusieurs volets. Ainsi, l’OMS a fourni et continue de fournir des orientations stratégiques et des directives techniques et des directives techniques sur comment prévenir, détecter et gérer de façon globale l’épidémie de Mpox. L’OMS a appuyé la formation de deux groupes de 215 points focaux de surveillance provenant de tous les départements du pays sur comment surveiller, rechercher et détecter les cas de la maladie, assurer la prise en charge et prévenir la propagation de la maladie. L’OMS a également renforcé les capacités des laboratoires du pays pour collecter, transporter de façon sécurisée les échantillons auprès des cas suspects, ainsi que la confirmation des cas par les laboratoires nationaux de référence. Dans ce cadre, nous avons fourni des équipements et des négatifs aux laboratoires. L’OMS soutient au jour le jour le centre des opérations d’urgence de santé publique dans la coordination technique de la réponse à l’épidémie. L’OMS a appuyé techniquement et financièrement le déploiement des misions conjointes de réponse le long du corridor fluvial que nous avons évoqué plus haut. L’OMS coordonne les partenaires techniques et financiers pour des appuis coordonnés au Gouvernement. Dans ce sens, l’OMS veille à ce que les actions des différents partenaires tels que l’UNICEF, le PNUD, l’UNESCO, le HCR, la Banque mondiale, le FNUAP, etc se complètent harmonieusement pour un contrôle rapide de la situation. L’OMS a mobilisé environ un milliard de francs Cfa auprès de l’USAID et d’autres entités pour soutenir le plan national dont la mise en œuvre est pilotée par le centre des opérations d’urgence de santé publique. Avec ce financement, l’OMS veille aussi à mettre en œuvre des investissements pour rendre le système de santé national plus fort et plus résilient et pour renforcer la mise en œuvre de la stratégie opérationnelle des soins de santé primaire. Enfin l’OMS coordonne les réunions transfrontalières avec la RD Congo pour la mise en œuvre des actions coordonnées au niveau des frontières.
A noter que le virus du Mpox a été isolé pour la première fois en 1958 au Danemark chez les singes venant d’Asie d’où son appellation variole du singe. La première description de la maladie chez l’homme a été faite en 1970 à Basankusu dans la province de l’Equateur, en RDC. Le Mpox est devenu la principale cause d’épidémies chez l’homme, particulièrement dans les pays d’Afrique centrale et occidentale.
Propos recueillis par Philippe BANZ