Les dirigeants d’Europe et d’Afrique se sont réunis à Bruxelles (Belgique) les 17 et 18 février 2022, au 6e sommet Union européenne-Union africaine destiné à réinventer leur partenariat et à affronter des défis communs, peu après l’officialisation par la France et ses alliés de leur retrait du Mali. Après une courte réunion des 27 consacrée aux tensions autour de l’Ukraine, 40 des 55 dirigeants membres de l’Union africaine (UA) se sont réunis avec leurs homologues de l’UE.

Au terme du sommet, une déclaration commune a été adoptée, accompagnée d’une liste de projets concrets, dont une constellation de satellites lancée par l’UE pour élargir l’accès à l’internet en Afrique. Le Sénégalais Macky Sall, président en exercice de l’Union africaine a lancé un appel au nouveau départ: «L’Afrique est en pleine mutation, elle a beaucoup changé. Plus qu’une mise à jour du logiciel, nous proposons d’installer ensemble un nouveau logiciel adapté aux mutations en cours. La lutte contre le terrorisme au Sahel ne saurait être la seule affaire des pays africains».
Le président français Emmanuel Macron, a, pour sa part, souligné: «Nous devons réinventer la relation». D’après Charles Michel, président du Conseil européen, «l’Europe a besoin d’une Afrique stable, sûre et prospère. Les coups d’Etat mettent en péril le développement».
Le Mali, le Burkina Faso, la Guinée et le Soudan ont été suspendus par l’UA après des coups d’Etat. Cependant, la junte au pouvoir à Bamako a contraint la France et ses partenaires européens à officialiser jeudi 17 février leur retrait militaire du Mali au terme de neuf ans de lutte antijihadiste.
Pour le chef de la diplomatie européenne Joseph Borell, «l’instabilité du continent africain est également alimentée par les nouveaux acteurs chinois et russes dont les méthodes et les agendas sont très différents des nôtres».
Selon un responsable européen, «les agissements dans plusieurs pays africains des mercenaires du groupe privé Wagner, dirigé par des hommes proches du Kremlin, ce que Moscou dément, sont un exemple des efforts de déstabilisation de la Russie dans des régions qui sont importantes pour l’UE».
A Bruxelles, les participants ont également fait valoir leur identité de vue sur le climat. Sur le continent africain, riche en matières premières, estiment-ils, les grandes puissances, Chine en tête, se livrent à une lutte d’influence. L’Afrique est courtisée, elle a le choix de ses partenaires. Bruxelles entend proposer un partenariat innovant et respectueux des pays d’Afrique. Critiqués par des ONG, les Européens assurent qu’il n’est «pas question d’évacuer les sujets de respect de l’Etat de droit et des droits humains».
La lutte contre la pandémie de COVID-19 est une autre priorité. Seulement 11% de la population du continent africain est entièrement vaccinée. L’UE a octroyé 150 millions de vaccins à l’Afrique et va poursuivre cet effort. Elle soutiendra aussi la création de centres de production de vaccins au Sénégal, au Rwanda, au Ghana et en Afrique du Sud. Les Européens veulent aussi lancer une stratégie globale d’investissements dotée de 150 milliards d’euros sur sept ans pour aider des projets voulus et portés par les Africains.
Paris quant à lui s’est engagé à réallouer aux pays d’Afrique 20% de ses droits de tirage spéciaux (DTS), des titres créés par le Fonds monétaire international (FMI) et alloués aux Etats qui peuvent les dépenser sans s’endetter.
Le président congolais Denis Sassou-Nguesso a parlé notamment du Bassin du Congo, «le deuxième poumon vert du monde après l’Amazonie. Et ses 220 millions d’hectares de forêt. Les peuples qui vivent dans le Bassin du Congo ont droit à un retour parce qu’ils protègent ce bassin, pas seulement pour eux-mêmes mais pour le monde entier».
Pour Macky Sall, «l’Afrique n’est pas responsable du réchauffement climatique». Il par contre, défendu le recours aux énergies fossiles, et réclamé un accompagnement sur une période de transition qui permette de donner de l’électricité aux 600 millions d’Africains qui n’en ont pas encore, soit environ la moitié de la population du continent.

Alain-Patrick MASSAMBA