A l’occasion de la Journée internationale pour le soutien aux victimes de la torture célébrée le 26 juin de chaque année, l’ONG congolaise de défense des droits de l’homme, le Centre d’actions pour le développement (CAD), a organisé à son siège à Moungali (4e arrondissement de Brazzaville) une conférence pour rendre hommage aux victimes de la torture et condamner ce ‘’déni abject’’ de la dignité humaine.

Pour le directeur exécutif du CAD, Trésor Nzila Kendet, cette rencontre a été une occasion pour se souvenir des victimes de la torture et les soutenir. La torture est une odieuse violation des droits humains. Le droit international interdit sans équivoque la torture en toute circonstance. Pourtant, cette pratique persiste dans de nombreux pays, y compris dans ceux où elle est criminalisée. Le Congo n’est pas épargné par la torture. Le CAD a listé près de quarante cas de torture depuis le début de l’année en cours et plus de 200 cas depuis sa création en 2021. «Ce n’est que la partie visible documentée par notre organisation. Avec les autres ONG de défense des droits de l’homme, si nous mettons nos chiffres bout à bout, d’une organisation à une autre, nous allons dépasser les 38 cas. Intérrogatoires violents, détention arbitraire, refus de soins médicaux, malgré les témoignages des victimes sur la réalité dans les commissariats, les postes de sécurité et autres lieux de privation de liberté, la justice est immobile … », a fustigé un membre du CAD.
Pour paraphraser le secrétaire général des Nations unies Antonio Guterres, les victimes, les rescapés ainsi que leurs familles ayant assisté à cette conférence ont souhaité que les tortionnaires répondent de leurs actes. ‘’Les tortionnaires ne doivent jamais être autorisés à échapper aux conséquences de leurs crimes, et les systèmes qui permettent la torture devraient être démantelés ou transformés’’, déplorait le secrétaire général de l’ONU dans une déclaration en 2020. A entendre les témoignages choquants des uns et des autres, les acteurs de ces violations ne devraient pas échapper à la justice. La torture avilit. Une victime, Roberto Lissassi, étudiant en licence à la faculté de droit de l’université Marien Ngouabi, présente un handicap visuel après avoir subi la torture dans un commissariat de la place en mai 2022. «J’ai pratiquement perdu ma vue, mon acuité visuelle est de trois mètres désormais. Le Congo est un Etat de droit, le président de la République en sa qualité de magistrat suprême, doit taper du poing sur la table pour que ma situation trouve une issue. J’étais à la cour d’appel: j’ai gagné, le dossier a été remis au parquet depuis le 15 mai de cette année, pour qu’il soit transmis à la première chambre correctionnelle, ce que le parquet n’entend pas faire. Je puis dire que le parquet est dans une posture de légaliser l’impunité», se lamente le jeune étudiant.
Face à ce triste constat, le CAD interpelle les pouvoirs publics afin que la torture disparaisse de la société congolaise. Saisissant cette opportunité, l’ONG a émis quelques recommandations: aux élus du peuple d’inscrire la lutte contre la torture et l’impunité parmi les priorités législatives de leur fin de mandat; de faire respecter les délais de prescription; d’encourager les mécanismes d’urgence et de garantir un accès équitable à la justice pour tous. «Ne laissons jamais s’éteindre la parole des survivants», a lancé le porte-parole du CAD.
Le 26 juin marque le jour où en 1987, la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants est entrée en vigueur.

Germaine NGALA

Abonnez-vous à notre bulletin d'information