Le géographe Martin Massouangui Kifoula, enseignant-chercheur à la faculté des lettres, arts et sciences humaines (FLASH) de l’Université Marien Ngouabi a animé une conférence-débat sur le thème:«Vulnérabilité du site urbain de Brazzaville, face à la menace climatique et à la poussée démographique». Cette conférence intègre le cycle de conférences sur le thème général «Pour une gestion citoyenne de la ville», initié par la fondation Niosi cette année. Elle a eu lieu le 22 avril dernier, à l’Institut français du Congo (IFC) à Brazzaville.
L’extension du tissu urbain de la ville suite à l’évolution rapide de la population expose le milieu physique aux aléas climatiques. Erosion, inondations, dégradation des routes, ensablement sont devenus actuellement des phénomènes récurrents dans nombre de quartiers. Quelles sont donc les approches à mettre en œuvre pour stopper ces phénomènes? C’est sur cette problématique que enseignants, statisticiens, étudiants au département de la Géographie de la FLASH de l’Université Marien Ngouabi et autres ont échangé pendant près de 3 h.
Sous la modération du Pr Josué Ndamba, membre de la fondation Niosi, Martin Massouangui Kifoula est parti du constat selon lequel dans la seconde moitié du 20e siècle, les villes du monde entier ont connu une augmentation des épisodes dramatiques. «En 2013 par exemple, nous avons constaté au nombre des catastrophes naturelles ayant engendré des pertes en vies humaines et des dommages considérables, plus de 80% de ces phénomènes liés aux effets soient climatiques ou hydrométéorologiques», a dit l’orateur.
Le conférencier s’est interrogé: «Comment évoluent les précipitations à Brazzaville? Comment la population urbaine évolue-t-elle ainsi que l’espace urbain de Brazzaville? Comment réagit le site urbain suite à l’évolution de la population et comment vont réagir les hommes?». Pour lui, il s’agit d’apprécier la vulnérabilité et la résilience de la ville.
Pour mener cette étude, l’intervenant a eu besoin des données quantitatives et qualitatives. Les résultats obtenus montrent que dans l’ensemble la tendance est à la hausse, c’est-à-dire que les jours extrêmement pluvieux sont en augmentation ces derniers temps. «Nous avons observé de 1950 à 2016, des sous-périodes excédentaires (1956 à 1962, 1980-1985 et de 1998 à 2008) et des sous-périodes déficitaires (1963-1979, 1986-1997 et de 2008 à nos jours)», a-t-il fait savoir.
A propos de l’évolution de la population, partant sur la base d’une figure, Martin Massouangui K. a précisé que jusqu’en 1978, l’évolution de la population était timide, mais qu’à partir de 1980, elle est passée de 200 à 410 habitants, pratiquement le double. Et en 1990, Brazzaville a atteint le seuil de 700.000 habitants et finalement en 2015, la population est estimée à 1.700.000 habitants. Suite à cette évolution, il y a en moyenne près de 300 ha qui sont occupés chaque année. «Ce qui fait peur, c’est que toutes les zones mêmes dites non constructibles sont occupées et même sur les connecteurs naturels», a-t-il déploré.
In fine, le conférencier a indiqué que cette situation n’est pas propre à Brazzaville, la ville de Kinshasa (RDC) se trouve dans la même situation. Pour rendre résilient le site urbain de Brazzaville, il convient de revoir la gouvernance urbaine. «Nous voulons mettre un accent sur la gestion foncière et sur l’assainissement des eaux fluviales», a-t-il martelé.
Le géographe a appuyé sa communication par un court métrage illustrant les quartiers Moukoundzi-Ngouaka (Makélékélé) et à Sukissa (Ouenzé), dits quartiers précaires. Cette projection a montré des marches exploratoires guidées par les populations des quartiers précités, lesquelles vivent au quotidien ces phénomènes et ont émis des suggestions.
La communication qui a fait l’état critique des lieux a suscité un échange nourri et des propositions. La question du non-respect du Plan directeur d’urbanisme de la ville sera aussi une des causes de la pression démographique qui entraîne des conséquences dramatiques. Les participants ont suggéré que de telles rencontres soient multipliées et qu’elles se tiennent dans d’autres sites, à l’instar de la Mairie, pour qu’un large public soit sensibilisé, pour redonner à Brazzaville sa dénomination de Brazza la Verte.

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