Frères et Sœurs…, bon dimanche! De prime abord, la liturgie de ce dimanche à partir du message extrait d’Ezéchiel et l’évangile nous conduit à faire un lien avec ce que dans l’Eglise on appelle la correction fraternelle: aller avertir le frère dont la conduite dérape pour le ramener sur le droit chemin.
Frères! Ezéchiel entend-il la Parole de Dieu qui lui commande d’avertir le méchant pour qu’il se détourne de sa conduite mauvaise? De même, à quoi pense Jésus lorsqu’il dit à ses disciples dans la page de l’évangile: Si ton frère a commis un péché, va lui parler seul à seul et montre-lui sa faute? A force de missionner le «Moi» vers «l’Autre» … le grand risque c’est de nous laisser croire que nous (moi) sommes justes et le méchant c’est l’autre.
En effet, cette lecture trop rapide peut nous laisser croire que le pécheur, c’est toujours l’autre. Trop souvent nous stigmatisons les autres, et pourtant les textes de ce jour nous suggèrent plus de «responsabilité dans la correction». Alors pour éviter de nous laisser entraîner sur cette pente bien peu évangélique, je vous invite à reprendre la lecture par ses clés: «si je dis au méchant: tu vas mourir, et que tu ne l’avertisses pas, si tu ne lui dis pas d’abandonner sa conduite mauvaise, lui, le méchant, mourra de son péché, mais à toi, je demanderai compte de son sang» (Ez.33,8). Par ailleurs, « … s’il refuse encore d’écouter l’Église, considère-le comme un païen et un publicain» (Mt.18,17). A se rappeler comment Jésus se comporte précisément avec les publicains et les pécheurs… mangeant et buvant avec eux, il les rejoint pour leur manifester la miséricorde de Dieu… on peut considérer que celui qui refuse d’écouter son prochain parce que, il est un publicain; n’est digne du Christ et donc pas chrétien. Notre foi et notre identité nous invitent à se comporter vis-à-vis du païen comme Jésus lui-même: avec amour, persévérance et compassion. C’est pour dire que Jésus manifeste un grand intérêt pour les relations interpersonnelles et donc la fraternité. Souvenez-vous, il les envoie deux par deux pour les missions comme d’ailleurs, les juifs ont besoin du témoignage au moins de deux personnes pour accréditer une vérité. De ceci, disons que l’histoire du Salut est en effet un «manifeste ou compendium» de fraternité ou de solidarité exclusif. La deuxième lecture de l’épître de Paul aux Romains nous le confirme. L’attention portée à celui qui quitte la route ne peut être, du jugement ou du mépris: «l’amour ne fait rien de mal au prochain» et «l’accomplissement parfait de la Loi, c’est l’amour». Prendre prétexte de la Loi comme nous l’observons en cette période de crise sanitaire avec les abus perpétrés par nos parents: les agents de la force publique qui abaissent l’autre et extorquent les intérêts, c’est pervertir la Loi. Saint Jacques souligne: «dire du mal de son frère ou juger son frère, c’est dire du mal de la Loi et juger la Loi». Autrement, coller comme par enchantement une infraction à autrui, alors qu’on aurait procéder fraternellement par une «verbalisation» est certes légale, mais la solidarité en court un danger. Ainsi, il n’y a pas mille chemins que celui que Jésus lui-même nous a montré: l’accomplissement parfait de la Loi, c’est l’amour.
La correction fraternelle ne peut donc être que l’expression de la miséricorde de Dieu qui veut nous réorienter sur le chemin de l’Alliance duquel on s’est égaré. Proclamer l’amour de Dieu envers Tous, il n’y a que cela qui nous est permis de faire. Encore faut-il que nous l’ayons vraiment accueilli pour nous! Saint Jean Chrysostome, un père de l’Église du IVe siècle, soulignait au sujet de cet évangile: «le Seigneur ne dit pas: «Si ton frère a commis un péché «Blâme-le», ni: «Punis-le», ni: «Fais-lui un procès, poursuis-le en justice» pour le discréditer ou le dénigrer. Mais: «va lui parler seul à seul et montre-lui sa faute». L’expression «tu auras gagné ton frère» dans la parabole nous suggère que c’est finalement la fraternité qu’il faut sauver à tout prix. Alors ce qu’on appelle la «correction fraternelle» ce n’est pas brutaliser son frère mais rassurer, réparer ou raccommoder le lien fraternel déchiré du fait du lien perdu avec notre Père commun, notre Père des cieux comme dit Jésus. Ce Père des cieux, c’est le même pour qui «si deux d’entre [nous] sur la terre se mettent d’accord pour [Lui] demander quelque chose, ils l’obtiendront». Ici encore, Jésus insiste sur: «l’unité ou la communion fraternelle comme marque de sa présence et signe de bénédictions».
Ce qu’il convient donc de demander dans la prière de ce jour, c’est la rédemption de la solidarité ou la délivrance du tissu de la fraternité broyé par le mépris et l’égoïsme; rangé par le tribalisme et l’injustice. Alors Chers (Chères) Chrétien(ne)s quand nous dirons et demanderons dans le Pater Noster d’être délivrés du Mal, n’oublions pas que le pire mal qui nous menace n’est pas celui qui nous viendrait de l’extérieur, mais celui qui nous ronge à l’intérieur. Surtout, méfions-nous avant tout du jugement que nous sommes portés à poser sur les autres et entreprenons dès lors de raccommoder la fraternité dans nos relations avec ceux qui dérapent sans perdre de vue que l’essentiel dont nous sommes appelés à être les témoins, c’est la douce miséricorde et le pardon divin.

Abbé Cellot Primat NKOUNGA MABIKAS
(Aumônier général de l’Association des Scouts et Guides du Congo)