L’Afrique Centrale vient de perdre un grand homme. Le Cardinal Christian Wiyghan Tumi, ancien archevêque de Douala (Cameroun), s’est éteint samedi dernier à l’âge de 90 ans. Sa longévité, il l’avait mise au service de son peuple, et surtout de la cause de la paix qui l’a vu sur les routes de ce Cameroun anglophone pour lequel il a dépensé ses dernières énergies.
Les velléités séparatistes des Anglophones ont conduit à des exactions sans nom.
Se disant lésés par les Francophones, les Anglophones continuent de réclamer leur Nation à eux, l’Ambazonie, le Cameroun du Sud, toutes choses que le Cardinal Tumi exécrait. Il pressait Francophones et Anglophones à dialoguer, à arrêter les violences. Il ne sera pas écouté, pas même quand il sera brièvement enlevé par ces Ambazoniens qui lui reprochent son activisme au service de tous.
Dire d’un Cardinal catholique qu’il fut un grand homme est paradoxalement réducteur. Car, non seulement le Cardinal Tumi était d’une stature physique imposante, mais encore son passage à l’Archidiocèse de Douala a marqué par ses réalisations, ses prises de position et ses mises en garde contre les gouvernants qui étaient d’une grande fermé et d’une justesse rarement mise en débat.
Avec sa mort, l’Afrique Centrale, généreusement dotée en la matière, perd un de ses porte-paroles les plus éminents. Nous comptons le Cardinal africain le plus jeune, en Centrafrique. Il nous reste deux autres éminences, en RD Congo, hommes d’épaisseur intellectuelle et morale reconnue. Ils sont guides et boussoles dans un monde qui en manque cruellement aujourd’hui. Avoir un cardinal est une chance.
Pour l’hypothèse insensée où on se demanderait, surtout dans notre pays qui en a assassiné un, à quoi servirait un cardinal, Christian Tumi en a donné la parfaite illustration de la réponse qui s’impose. Tout comme Laurent Monsengwo et Fridolin Ambongo en RDC ; Alessandro Donascimento, en Angola. En Centrafrique, on peut dire que c’est le jeune Cardinal Dieudonné Nzapalainga qui a tenu son pays par la main et lui a fait traverser l’épreuve du feu qui a failli consumer les communautés, au bord de la confrontation religieuse.
Un cardinal qui s’en va est un indicateur du vivre ensemble qui disparaît. Les prélats ne sont pas des voix que pour l’Eglise catholique et les chrétiens. Ils ont aidé à une transition qui s’annonçait sulfureuse en RD Congo. En Angola, des aspérités sociales ont pu être gommées par la discrète mais efficace voix du Cardinal Dosnascimento. Disons adieu au Cardinal Tumi, mais ne renonçons pas à ce qu’il pouvait incarner aux moments difficiles de la vie au Cameroun et même dans la sous-région.
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Albert S. MIANZOUKOUTA