Le Centre d’information des Nations Unies (CINU) à Brazzaville a abrité mardi 10 août 2021 un séminaire-atelier, organisé par l’Action des chrétiens pour l’abolition de la torture au Congo (ACAT) et la Fédération internationale des ACAT-FIACAT.

Il s’est agi d’évaluer le niveau d’exécution du protocole facultatif à la Convention contre la torture, depuis sa mise en œuvre en août 2017 par les deux organisations, avec l’appui du ministère de la Justice et la Direction générale de l’administration pénitentiaire; tout comme de faire l’état des lieux privatifs de liberté, notamment les maisons d’arrêt, les commissariats de police et autres lieux carcéraux.
«Le contrôle des lieux privatifs de liberté, un réel défi pour une bonne administration de la justice au Congo, après le lancement du processus de ratification du protocole facultatif à la convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (OPCAT)» a été le thème de ce séminaire-atelier. Une dizaine d’ONG œuvrant dans le domaine des droits de l’homme y a pris part.
Le séminaire a permis aux participants d’être en phase avec les initiatives gouvernementales prises depuis l’adoption, par le Parlement congolais, de la loi n°9-2016 du 25 avril 2016 autorisant la ratification du protocole facultatif à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (OPCAT). Celle-ci a été promulguée par la président de la République à la même date avec pour conséquence la mise en place d’un mécanisme national de prévention. Cinq ans après, les instruments de ratification de cette loi ne sont pas encore transmis au secrétariat des Nations Unies pour que le Congo soit un Etat parti à ce protocole facultatif. Depuis cette date, aucune réflexion n’est amorcée par le Congo sur le choix du type de mécanisme national de prévention (MNP) à la torture et sa mise en place.
Ce mécanisme permettra d’accéder à tous les lieux de détention sans restriction, à tous les documents et d’avoir l’opportunité de s’entretenir en privé avec toutes les personnes privées de liberté ainsi qu’avec d’autres sources d’information et parties prenantes appropriées.
Différentes options sont promues par plusieurs pays ayant ratifié cet instrument. On peut citer le Sénégal et le Rwanda. Ces deux pays, pour mettre en place leur mécanisme national, ont choisi la création d’une nouvelle institution pour le Sénégal, et l’intégration dans une autre institution déjà existante comme la commission nationale des Droits de l’homme pour le Rwanda, afin de répondre à cette exigence de l’OPCAT.
Dominique Boukaka, conseiller aux affaires pénitentiaires du ministre de la Justice, a affirmé que le Congo est un Etat qui lutte contre la torture. «La loi a été votée et le décret de ratification a été signé. Il ne reste plus que le dépôt des instruments de ratification au siège des Nations Unies. Le dépôt des instruments se fera dans un délai raisonnable, bien que nous ayons accumulé un retard de cinq ans depuis la ratification du protocole facultatif. Les lieux de détention, notamment les maisons d’arrêt et les commissariats de police sont ouverts à toutes les organisations des droits de l’homme.» Le respect des délais et les conditions de détention préventive, a-t-il poursuivi, est de quatre mois. Ce projet de lutte contre la détention préventive abusive est déjà à sa seconde phase d’exécution dans les maisons d’arrêt de Brazzaville, Pointe-Noire, Dolisie et Ouesso. Lors des sessions criminelles dans les cours et tribunaux de ces villes, la loi sur l’abolition de la peine de mort a été remplacée par la réclusion criminelle à perpétuité. «Ce qui est très grave dans la poursuite de la procédure par manque de code, et entrave la bonne marche de la justice au Congo. Il faut faire vite pour déposer cet instrument», a-t-il indiqué.
Parlant du type de mécanisme national de prévention que le Congo devra adopter, Christian Loubassou, président de l’ACAT Congo, a fait part des expériences rwandaise et sénégalaise. Au Sénégal, il existe l’Observatoire national de prévention des droits et des libertés.
Pour les participants, il s’agit de réfléchir sur les modalités de mise en œuvre de cet instrument novateur et de poser les bases d’une réflexion dont le Gouvernement pourra se servir pour décider du modèle de mécanisme national de prévention à mettre en place.
Pour rappel, l’ACAT Congo est une organisation de défense des droits de l’homme fondée en 1993 et affiliée à la FIACAT depuis 2000. Créée en 1987, la FIACAT lutte pour l’abolition de la torture et de la peine de mort. Il regroupe une trentaine d’associations nationales.

Pascal BIOZI KIMINOU