Le Centre d’actions pour le développement (CAD), une ONG pour la promotion et la défense des droits humains dans le paysage associatif congolais depuis février 2021, a animé au Centre d’information des Nations Unies (CINU) à Brazzaville mercredi 20 octobre 2021, une conférence-débat marquant la fin de la campagne de sensibilisation et de mobilisation «Justice pour les victimes du référendum 2015», débutée le 15 septembre dernier.

Animée principalement par Trésor Chardon Nzila Kendet, directeur exécutif du CAD, et modérée par Félix Batantou Oumba, président du conseil de concertation des ONG de développement et membre de l’association Terre et village, la conférence a eu pour objet de demander justice pour les victimes du référendum de 2015. Elle a démarré par la projection d’un film autour des manifestations du referendum de 2015 et des témoignages qui ont servi de fond pour les échanges.
Il a été rappelé que cela fait exactement six ans depuis que les forces de défense et de sécurité ont réprimé, dans la violence et le sang, des manifestations pacifiques contre la réforme constitutionnelle d’octobre 2015 relative au nombre des mandats présidentiels et à la limite d’âge. Le bilan officiel de cette répression fait état de quatre manifestants tués par balle, dont trois à Brazzaville et un à Pointe-Noire et dix blessés, parmi lesquels trois agents de la Force publique. Un bilan largement sous-évalué selon d’autres sources qui ont relevé des dizaines de morts et de blessés. A la vérité, le nombre exact des victimes reste inconnu, car aucune enquête n’a été menée en dépit des multiples demandes des organisations de défense des droits humains et de la communauté internationale.
En 2018, auprès de l’ONU, le Gouvernement s’était engagé à mettre en place une commission d’enquête indépendante pour faire la lumière sur ce qui s’est passé en 2015 et dans le département du Pool en 2016. Pour les organisateurs de la conférence-débat, cet engagement n’a jamais été tenu. La commission d’enquête n’est toujours pas mise en place.
La campagne a été une initiative pour faire mémoire et date de cet épisode douloureux et rappeler l’exigence de justice à l’opinion nationale et internationale.
Le CAD s’appuie sur la Déclaration universelle des droits de l’homme; il en fait son cheval de bataille. L’organisation milite pour un Congo respectueux des droits humains où chaque citoyen peut se prévaloir de tous les droits consacrés par la Déclaration universelle des droits de l’homme. En menant cette campagne, le CAD a répondu à son plan d’actions qui s’articule autour de cinq axes, parmi lesquels la mobilisation qui est une forme de pression à l’endroit des gouvernants. La campagne a permis par ailleurs de comprendre les obstacles à la mise en place de la commission d’enquête indépendante.
Pour le directeur exécutif du CAD, «ce qui s’est passé en 2015, ce sont des crimes contre l’humanité. Et, il est de la responsabilité de l’Etat que les victimes trouvent réparation. La répression de 2015 a occasionné des blessures profondes. Le Gouvernement a l’obligation de les panser. Car, elles ne seront jamais oubliées tant que le Gouvernement ne remplit pas l’obligation de justice et de vérité. La République n’a pas vocation de tuer ses citoyens, mais de les protéger. Toutes les fois qu’un droit est violé, l’Etat doit le réparer. Le CAD ne veut pas que cette période tombe dans les oubliettes».
La mobilisation sur les victimes étant une question d’intérêt national, les représentants des différentes forces ont répondu nombreux à cette conférence-débat, en l’occurrence les organisations de défense des droits de l’homme, les ministères, les partis politiques de la majorité comme de l’opposition et les citoyens intéressés.
Plusieurs propositions que le CAD pourra exploiter ont été formulées à l’issue des échanges. On peut citer entre autres la proposition d’une démarche en direction des Nations Unies pour leur rappeler que l’engagement pris par le Gouvernement congolais n’est pas toujours honoré. De la sorte, le partenaire peut exiger la mise en place de la commission d’enquête librement acceptée par l’Etat en 2018; prise des sanctions à l’encontre des responsables civils, militaires et policiers ayant commis des crimes à cette époque.

Philippe BANZ