Le numéro que vous tenez entre les mains est historique. Il est le 4000è, véhicule d’une histoire africaine, régionale ou nationale dont nous avons rendu compte avec régularité. La semaine dernière, nous vous annoncions que ce journal venait d’accomplir, le 4 septembre, ses 68 ans. Une occasion de rendre gloire à Dieu, de dire merci aux missionnaires spiritains qui nous ont fondés et à toutes ces mains qui l’ont confectionné depuis 1952.
Le hasard fait que c’est en cette 68è année que nous bouclons ce 4000e numéro. Le chiffre 4000 est impersonnel comme tous les chiffres. Si nous ne l’habillons pas de tout ce qui fait sens, Il ne parle pas de lui-même pour rendre compte de l’abnégation qu’il a fallu pour créer et faire vivre, au cœur de l’Afrique, un instrument de liaison de son élite. De la témérité à vouloir se maintenir dans un continent qui affirmait ses légitimes ambitions à la souveraineté et au refus de toute dépendance.
Un journal qui a parfois ramé à contre-courant dans ce pays où une intelligentsia sourde à la tolérance menaçait, à l’indépendance de 1960, de transformer les églises en salles de cinéma. Et où l’idée même de Dieu était présentée comme opposée à l’affirmation des devoirs citoyens. Un journal à qui rien n’a été épargné: ni la torture et l’emprisonnement de l’Abbé Louis Badila, le premier Directeur congolais; ni l’assassinat du seul cardinal que nous ayons eu. Ni l’expulsion de missionnaires.
L’emprisonnement et l’intimidation de Bernard Mackiza, rédacteur-en-chef, et du jeune journaliste Albert S. Mianzoukouta, ensuite, ne furent que le énième ajout à une longue tresse de ces difficultés qui n’ont pas manqué en 68 ans. Notre anniversaire n’est donc pas un triomphe. Notre N° 4000 n’est pas un aboutissement non plus. Au contraire, ils sont un rappel à affronter le futur. A aborder les défis de la mutation et à entrer de plain-pied dans une ère où le journal papier ne sera peut-être plus en vogue.
Nous sommes conscients de ces enjeux. Nous sommes conscients de l’éclatement de notre électorat du fait d’une offre abondante et polysémique. Nous sommes préparés à aborder ces interpellations avec une équipe de jeunes talents formés, et résolus à affronter les bourrasques à venir. A faire en sorte que d’autres anniversaires nobles se fêtent. A honorer avec fidélité notre rendez-vous avec vous qui nous lisez et qui faites en sorte que, 68 ans durant, La Semaine Africaine, ses plumes de talent, restent parmi vos lectures privilégiées. Merci donc !
Nous ne savons pas de quoi les prochaines 68 années seront faites. Dans tous les cas, nous comptons toujours venir vers vous avec notre message de paix et de fraternité parmi les hommes, de promotion des valeurs et des initiatives qui nous feront avancer ensemble en tant que nation, dans la diversité de nos origines et, depuis toujours, de nos croyances. Nous entendons servir l’homme et porter au loin le message d’amour de l’Eglise. Aidez-nous.

Albert S. MIANZOUKOUTA