Les coups d’Etat au Burkina Faso se succèdent tellement que l’on ne sait plus à partir duquel il faut parler d’anormalité. Le 9è coup d’Etat qui vient de se produire serait-il celui en trop ? A partir de quand les choses sont-elles normales ou anormales dans un pays où l’avant-dernier coup d’Etat ne date que de janvier dernier ?
Et puis quel sens donner à ces manifestations de foules acclamant l’homme fort du moment dimanche dernier à Ouagadougou ? Ne sont-ce pas les mêmes foules qui acclamaient Paul-Henri Sandaogo Damiba qui venait de renverser le président élu Roch Marc Christian Kaboré ? Chaque Burkinabé est-il doté de quatre mains : deux pour applaudir, et deux pour chasser l’indésirable ?
Car, il n’est pas croyable de penser qu’en seulement 8 mois, ils ont changé d’opinion, applaudissant ce qu’ils ont honni (ou l’inverse) en un laps de temps aussi bref ! Certes nos opinions sont versatiles, mais dans le cas du Burkina Faso, cette rapidité de retournements de veste, neuf fois depuis l’indépendance, n’est pas signe de sagesse dans un continent où les expériences démocratiques ne durent pas.
Et, donc, dans une zone comme la nôtre où le dernier coup d’Etat remonte à longtemps, notre stabilité, même surfaite, même artificielle, donne l’impression d’être un modèle de gouvernance. L’heure des coups d’Etat n’est apparemment pas révolue. Déjà la Guinée et le Mali qui, eux aussi, se débattent dans les conséquences de leur propre coup d’Etat, ne sont pas venus ajouter une touche de vertu démocratique à cette région de l’Afrique de l’Ouest, naguère modèle.
A ce rythme, nous en serons réduits à refaire nos conférences nationales, nos dialogues inclusifs, nos processus électoraux bidons, un tango bien marqué : deux pas en avant, trois pas en arrière. Nous avancerons ! Car, à reprendre en 2022 les scenarii de la politique des années 1960, ne nous fait gagner aucun centimètre en plus dans la direction souhaitée.

Albert S. MIANZOUKOUTA