Comme premier évêque de Dolisie, diocèse nouvellement créé (24 mai 2013), rien, ni personne ne pouvait encore imaginer Mgr Bienvenu Manamika Bafouakouahou prendre les rênes de l’archidiocèse de Brazzaville. En effet, à la date du dimanche 21 novembre 2021, en la solennité du Christ-Roi de l’univers, Mgr Anatole Milandou après avoir atteint la limite d’âge (Cf. Can. 401), passa le «témoin» à Mgr Bienvenu Manamika Bafouakouahou, comme nouvel archevêque de Brazzaville, en présence du président de la République, des membres du Gouvernement et de quelques représentations diplomatiques en service dans notre pays. Un événement riche en couleurs, mêlé de joie pour les uns, de tristesse et nostalgie pour d’autres …

De ce premier anniversaire (21 novembre 2021–21 novembre 2022) comme archevêque métropolitain de Brazzaville, que pouvons-nous retenir? Sommes-nous en droit de pouvoir dresser un premier bilan? Quelle vision et/ou projet pastoral envisage le nouveau pasteur pour «son» diocèse?

1. Des attentes tous azimuts
Loin de vouloir rappeler ici le contexte assez difficile de méfiance installé entre clercs, et de crise liée à une administration plus ou moins confuse surtout du point de vue économique de l’archidiocèse de Brazzaville, des lettres de dénonciations anonymes dans les réseaux sociaux, de la non participation effective du clergé à certaines rencontres de fraternité … obligeant par le fait même à Mgr Anatole Milandou de s’exprimer à travers une lettre pastorale: «Mon message de Noël est un cri de douleur», dira-t-il. Et de se justifier: «Oui, un cri de douleur! parce que les chrétiens de l’archidiocèse, les prêtres et moi-même, avons souffert des propos haineux, mensongers et diffamatoires qui ont été injectés dans les réseaux sociaux»; et de poursuivre: «Souvent, nous préférons nous taire pour ne pas donner de l’oxygène à ceux qui en ont fait leur passe-temps. Mais cette fois-ci, ils ont scandalisé et choqué du monde! J’ai donc pensé réagir parce que beaucoup nous reprochent de garder silence» (Cf. Interview dans La Semaine Africaine du 18 août 2020).
C’est donc dans ce contexte de crise et de diffamations mensongères (aux dires de Mgr Anatole), que sera installé Mgr Bienvenu Manamika Bafouakouahou comme nouvel archevêque de Brazzaville. D’où se fera sentir le besoin d’un changement radical et des attentes tous azimuts pour un renouvellement des cœurs entre clergé et laïcs, appelés à suivre le Christ et à vivre de ses sacrements non comme des ennemis, mais plutôt en frères et sœurs, Fratelli tutti!

2. Convocation de l’A.S.O.A.
L’Assemblée Spéciale des Ouvriers Apostoliques (A.S.O.A.), convoquée par la lettre circulaire n°194/AB/A/S du 07 mars 2022, et qui s’est tenue du 26 juin au 2 juillet 2022, aura donc été le premier grand rendez-vous de Mgr Bienvenu Manamika Bafouakouahou pour essayer de «panser» les cœurs de cette portion du peuple de Dieu «enrhumée» par les propos haineux avec une situation de frustration pour certains, et pour mieux écouter en fin de compte avec une attention soutenue les doléances des uns et des autres en vue d’un nouvel élan de communion ecclésiale.
Et pour mieux vivre ce nouvel élan de communion ecclésiale, il a été proposé durant les travaux de l’A.S.O.A. de revisiter le saint Magistère de l’Eglise à travers des conférences et des réflexions théologico-pastorales afin de permettre une bonne marche commune dans un esprit fondamentalement synodale telle que voulue également par le Pape François pour toute l’Eglise universelle.
L’A.S.O.A. aura permis également les retrouvailles au diocèse des prêtres de la diaspora, sur invitation de l’archevêque, afin de partager leurs sentiments fraternels dans un esprit de dialogue sincère pour des lendemains meilleurs pour l’ensemble de l’archidiocèse de Brazzaville.

3. L’homme qu’il faut à la place qu’il faut
Au-delà de tous les discours et engagements pris durant les rencontres ou visites pastorales du nouvel archevêque, le vrai problème est toujours celui de voir dans toutes les institutions du monde afin de parvenir aux résultats escomptés, celui de mettre l’homme qu’il faut à la place qu’il faut.
Ce désir, Mgr Bienvenu Manamika Bafouakouahou encore coadjuteur, l’avait exprimé lors de sa prise de possession canonique dans la cathédrale Sacré-Cœur de Brazzaville, le 24 mai 2020, en promettant de mettre le prêtre qu’il faut à la place qu’il faut; étant entendu que son «amour pour le Christ et l’Eglise» lui «interdirait de négocier avec les écarts ou impairs qui causent des blessures à l’ensemble de l’Eglise». Et de conclure: «Chacun en toute objectivité et humilité devra assumer sa part de responsabilité». Ceux qui ont été nommés en cette première année pastorale (surtout après le grand rendez-vous de l’A.S.O.A.), ad experimentum pourrait-on dire, doivent donc se considérer comme les «élus» de son cœur après s’être informé auprès des laïcs et responsables des Conseils paroissiaux lors de ses visites pastorales. Ce qui n’est pas toujours le cas malheureusement dans la sphère politique surtout africaine; puisque de plus en plus bon nombre de politiciens comme on le sait, se retrouvent catapultés ministres ou députés parce que parents d’un tel, ou tout simplement parce que liés à des lobbys maçonniques. Rien donc d’étonnant pour ces arrivistes et pseudos politiciens quand ils nous présentent zéro résultat au quotient en fin de mandat. Pourquoi alors s’étonner en fin de compte si une bonne partie de notre Afrique a du mal à «décoller?» (Cf. Giscard Kevin Dessinga, Lettre ouverte à l’Afrique soixantenaire. Bilan subjectif d’une gouvernance au subjonctif, Paris, l’Harmathan, 2020).
Je ne saurais conclure cette tribune relative au premier anniversaire de l’installation de Mgr Bienvenu Manamika Bafouakouahou comme neuvième archevêque de Brazzaville, sans pour autant rendre un vibrant hommage à son prédécesseur, Mgr Anatole Milandou, pour sa simplicité, son humilité et son esprit d’écoute durant son ministère pastoral (et Dieu seul sait combien chacun en a plus que profité); qualités que devrait avoir tout pasteur sans pour autant tomber dans la lassitude encore moins dans une espèce de recroquevillement en inscrivant ou renvoyant les rencontres avec ses collaborateurs immédiats aux calendes grecques.
Pour mener à bien la barque de Saint Pierre, et devant les nombreux défis visibles et invisibles de l’archidiocèse de Brazzaville, Mgr Bienvenu Manamika Bafouakouahou (Président de la Conférence des évêques du Congo depuis mai 2022) avait promis de se faire humble pour apprendre «les codes et usages de la mission d’archevêque de Brazzaville»; certain qu’en ce premier anniversaire d’avoir juste posé les balises, et que l’apprentissage des «codes et usages» devrait encore commencer, nous lui souhaitons avec nos humbles prières un joyeux anniversaire pour cette première bougie!

Eric Béranger N’SONDE
Prêtre en mission pastorale en Italie.