Dans le cadre des débats à l’Institut français du Congo (IFC), la Fondation Niosi a animé jeudi 18 novembre 2021 à Brazzaville, une conférence-débat sur le thème: «Problème d’assainissement de la ville de Brazzaville: constats et pistes de solutions».

Le thème a été développé par Jean-Jacques Youlou, urbaniste et ancien directeur général de l’urbanisme, sous la modération de Josué Ndamba, membre de la Fondation Niosi.
La ville de Brazzaville vit dans la précarité à cause du déséquilibre grandissant entre la croissance urbaine et la maîtrise des problèmes d’assainissement, de gestion des eaux pluviales, des eaux usées domestiques et industrielles, des excrétas, des déchets solides et bien d’autres. A cela s’ajoutent les conséquences catastrophiques de l’extension désordonnée de la ville, avec la dégradation des voies, l’ensablement, les érosions entraînant l’écroulement des maisons et autres catastrophes.
L’une des pistes de solutions est d’abord la conscientisation des citoyens qui doivent prendre à bras le corps les problèmes de la cité, en s’investissant en connaissance de leurs droits et devoirs. Car, Il n’y a pas que l’Etat seul qui doit impulser le développement.
L’exposé, qui a suscité moult interventions de la part des participants, a démontré que les problèmes d’assainissement partent de la création même de Brazzaville par les colons. C’est une ville qui a été créée sans plan d’aménagement. A l’époque la ville a connu deux quartiers indigènes: Poto-Poto et Bacongo. Le premier, avec un sol boueux, n’a pas eu un plan de drainage des eaux pour les conduire vers le fleuve. Depuis l’indépendance, Brazzaville ne fait que s’agrandir sur le même principe, c’est-à-dire qu’on ne tient pas compte d’un plan d’aménagement pouvant orienter les populations pour mieux lotir la ville. Aujourd’hui, la ville s’étend de manière anarchique et l’Etat est à la merci des propriétaires fonciers. La culture urbaine faisant malheureusement que chaque individu sente la nécessité d’avoir son propre terrain de parcelle, la ville prend une ampleur grandissante sans contrôle. L’agrandissement de la ville devient anarchique, même dans les zones non habitables.
Pour sortir de ce schéma, l’une des solutions est la conscientisation des citoyens en leur montrant qu’il y a des zones inappropriées à l’habitat. D’autres pistes ont été évoquées par le conférencier comme la professionnalisation de la gestion de la ville. Les mairies doivent en effet avoir des professionnels de l’urbanisme pour éviter certains dérapages. Et, l’Etat doit se réveiller pour développer la ville selon les règles de l’art. Il a insisté sur le fait d’aller vers les actes de pédagogie de la ville pour mieux conduire les citoyens. L’urbanisme obéit nécessairement à un code qu’il faut suivre et appliquer. Cela exige des moyens et des spécialistes de l’urbanisme. Pour le moment, Brazzaville ne semble pas aller dans ce sens alors que son assainissement a fait l’objet de plusieurs rapports liés aux études de programmation et de réalisation d’un certain nombre d’ouvrages d’assainissement, surtout les grands collecteurs. Question: pourquoi après tant d’études, de plans et de rapports de réalisation d’ouvrages depuis avant l’indépendance du pays, on n’assiste malheureusement pas à l’amélioration de l’assainissement de la capitale et des autres villes?
Les problèmes ne font que s’aggraver. L’image que chacun a de la ville est terne. Les érosions prennent de l’ampleur et il n’est pas surprenant de voir des maisons s’écrouler et finir dans des ravins de plus en plus énormes; des monticules de déchets, des chaussées dégradées accélérant l’usure des véhicules; l’encombrement des rues par des véhicules hors d’usage, des matériaux de construction, des nuisances sonores de jour comme de nuit. Face à cela, les citoyens sont désemparés.
Le conférencier a suggéré de veiller à ce que les emplacements choisis deviennent des centres urbains spacieux et salubres. Mais, le problème de l’assainissement est récurrent à Brazzaville.
Pour Iloïm Ibara, urbaniste, «le problème d’assainissement est bien visible. La ville a des problèmes d’ordures ménagères, d’éboulements de terrain et bien d’autres. Des problèmes criards sont vécus au quotidien par nos concitoyens. Il s’agit, ici, d’une approche participative, parce que l’Etat, seul, ne peut faire face à ce travail. Cela doit se faire entre l’Etat et les collectivités locales. L’Etat a déjà mis en place des lois. Pour que celles-ci s’appliquent dans leur juste valeur, il faut l’implication des populations».
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Philippe BANZ