Nous ne savons pas comment se résorberont les crises qui secouent actuellement l’Afrique de l’Ouest. Les coups d’Etat qu’il ont organisés successivement en Guinée, au Mali par deux fois et au Burkina Faso appellent un retour rapide à l’ordre d’avant. Etait-il le bon? Là n’est plus la question aujourd’hui: dans nos pays, tout en étant bougons, insatisfaits ou mécontents, il nous arrive de nous contenter de la réalité qui est. Mais ce qui semble étrange aujourd’hui, c’est que le Soudan à part, nos peuples ne sont pas mécontents des coups d’Etat qui ont eu lieu.
C’est signe que les populations étaient véritablement exaspérées. Que tout démocratiquement qu’ils aient été élus, les Président de ces pays, les dirigeants de leurs régimes de transition n’ont pas eu le temps de faire asseoir un mode de faire dont la Constitution serait le socle inviolable. Ils ont été emportés par de jeunes militaires ayant sifflé la fin d’une récréation qui semblait plus désastreuse que la vue d’hommes en treillis scandant les ordres et les admonestations.
Mais ces situations ne sont pas qu’internes à ces pays ; elles commencent à déborder et à inquiéter au-delà. Car, non seulement le Mali, le plus emblématique de cette situation, semble préférer s’enfoncer dans la voie de l’isolement et de la fuite en avant. Refus des injonctions de la Communauté économique de l’Afrique de l’Ouest, refus d’obtempérer aux rappels comminatoires de l’ONU et, pour couronner le tout, un bras de fer avec la France dont on ne sait pas sur quoi il va déboucher. Et en faveur de qui.
C’est une situation inquiétante. D’autant que la contagion n’est pas loin. Les soubresauts autour du palais présidentiel de Bissau la semaine dernière n’annoncent peut-être pas autre chose que le mécontentement dans une caserne, mais par les temps qui courent, ce genre de signes est rarement annonciateur de lendemains de paix. Espérons que les leçons qui seront tirées de ces événements seront autres qu’une simple imitation des faits que personne ne semple vraiment déplorer, ni un éloignement des impératifs de démocratie pluralistes tels que nous avons rêvés au sortir de nos conférences nationales.
Que se passera-t-il au Mali ensuite? Sur quoi débouchera la crise en Guinée? Que deviendra le Burkina Faso, pays des hommes intègres, où se tient en même temps le procès de l’icône du pays, Thomas Sankara? Quelle est désormais l’Afrique que nous souhaiterions bâtir, sans la stabilité de préférence, celle des militaires qui nous mènent au pas? Notre présent est fait de privations, notre avenir s’annonce incertain, sans même les excuses que nous nous sommes toujours données.

Albert S. MIANZOUKOUTA