Depuis les temps immémoriaux, jusqu’à l’aujourd’hui de notre monde, nul n’est censé ignorer la joie et le bonheur de vivre en famille. Dans le récit biblique de la création, l’homme a été créé par Dieu par amour: «C’est pourquoi, l’homme quittera son père et sa mère, et s’attachera à sa femme et ils deviendront une seule chair» (Gn 2, 24). De façon donc naturelle, le Seigneur veut faire de ces deux êtres des personnes heureuses et capables de s’accepter, en dépit de leurs différences, en créant un climat de joie et d’amour autour d’eux. Ceci, en faisant montre, dans leur vécu, d’une ambiance à même de faire sentir le parfum d’une vie pleine d’amour. Cela pourtant ne veut nullement signifier qu’en s’unissant, il n’y a que joies et que le navire matrimonial de leur union ne connaîtra ni tempêtes, ni ténèbres, moins encore des temps du désert. Bien au contraire!

En effet, ce qui fonde ce lien entre homme et femme, c’est l’amour, le mariage. Dans le droit de l’Eglise catholique, ce concept signifie «l’alliance matrimoniale, par laquelle un homme et une femme constituent entre eux une communauté de toute la vie, ordonnée par son caractère naturel au bien des conjoints ainsi qu’à la génération et à l’éducation des enfants…».(Can.1055- § 1). Une fois consenti, le lien matrimonial indissoluble engage pour toute la vie, en toute fidélité dans la recherche bonum coniugum, et plaise à Dieu, du bonum prolis.
Toutefois, il suffit de jeter un coup d’œil rapide sur les réalités actuelles du mariage en général et en République du Congo, pour se rendre à l’évidence du fait que bon nombre de défis se dressent sur la voie l’harmonie: l’infidélité, l’instabilité familiale, l’irresponsabilité chez certains parents, la lutte entre femmes de différentes classes sociales, la négligence dans l’entretien du ménage, l’absence de vie de prière dans certaines familles.
En outre, aussi, d’autres défis tels que la multitude des unions de fait (55%) qui prennent le dessus au Congo-Brazzaville avec pour conséquence la diminution des célébrations des mariages sont à relever.
Pourtant, la Religion, tout comme la société, accordent une grande importance au mariage; l’influence des traditions coutumières, le droit à la polygamie contenu dans bon nombre de législations; la sujétion de la femme à la domination masculine, la surenchère de la dot qui entraînent nombre de mariages non sacramentels.
Cet article se veut une analyse du mal qu’il faut éradiquer à la racine pour parer à ces difficultés matrimoniales, tout en mettant en exergue le rôle de la femme, en occurrence la femme congolaise, dans sa contribution et sa participation au maintien d’une bonne vie matrimoniale. C’est par elle que passe, sans doute aucun, le maintien de l’équilibre et de la réussite du mariage. C’est ainsi que nous évoquerons, ici, quelques aspects clés qui peuvent être sources de remède, en les abordant sous l’angle coutumier, juridique, éducatif et spirituel.

Le mariage coutumier
En République du Congo, la célébration du mariage civil est souvent précédée du mariage coutumier, communément appelé la dot. Elle est une condition sine qua non pour qu’un mariage soit enregistré à l’état civil. Au sens de l’article 140 du Code congolais de la famille, la dot «peut être payée en nature ou en espèces ou sous les deux formes. En aucun cas, son montant ne pourra dépasser la somme de 50.000 francs.» Mais la théorie juridique est loin de la pratique. Les familles vont tellement au-delà de ce montant que le mariage prend les allures d’une «vente» de la fille, un moyen de s’enrichir. Pour ce faire, les jeunes se cantonnent, le plus souvent, dans des unions libres. Et comme si cette limite ne suffisait pas, certains hommes, les prétendants, se croient autorisés à se comporter en «acheteurs» d’une supposée «marchandise», au point qu’une fois au foyer, ils font subir un traitement dégradant, marginalisant, voire humiliant à leur femme.
La dot devient ainsi un facteur perturbant et instable du lien matrimonial. Pourtant, «la dot est avant tout un geste pour montrer à la famille de la mariée la capacité de l’homme prendre soin de leur princesse, et les remercier d’en avoir fait la femme quelle est devenue…». Ngeleka:2018). Malheureusement, la dot est devenue une forme de commerce aux conséquences criardes.
La femme congolaise dvrait être cette voix qui crie: «Assez, je ne suis pas un objet de vente, mais un sujet de droit.» La dot étant considérée comme un mariage coutumier, il parait donc important, de nos jours, non seulement d’évangéliser nos coutumes, mais aussi de les éduquer. Il importe de s’interroger sur l’origine de certaines pratiques coutumières aux allures ténébreuses et aux conséquences alarmantes, tout en y donnant un vrai sens en vue d’y apporter la lumière pour un futur meilleur. A titre purement illustratif, à quoi serviraient, de nos jours, une lampe Luciole, une machette dans la liste d’une dot célébrée en Europe, alors que, jadis, nos grands-parents les demandaient parce que dans nos villages, il n’ y avait pas d’électricité et que pour le travail de champ, ils avaient besoin d’outils. Voilà jusqu’à quel point la mise à jour de certaines pratiques coutumières s’avère importante. A quoi servirait la surenchère d’une dot si, dans l’avenir, la femme en devient esclave et victime?

Au niveau éducatif
Sous l’aspect éducatif, à l’instar de toute femme dans le monde actuel, la Congolaise est inscrite à l’école de la revendication du respect de ses droits qui fait d’ailleurs l’actualité. Elle est censée s’informer entre autres de ses prérogatives matrimoniales pour éviter d’être en marge de la société. Nous louons, pour ce faire, toutes ces ONG qui luttent pour la promotion du genre en République du Congo.
Toutefois, de la même manière que la femme s’ouvre pour connaître et revendiquer ses droits, c’est de la même façon qu’elle doit connaître aussi les obligations qui lui incombent.
Combien de foyers se disloquent de nos jours par le fait que la femme n’a même pas de temps pour l’entretien de sa famille, l’attention à son conjoint et l’éducation de la progéniture! Combien de fois le travail féminin prend le dessus sur l’entretien de la famille! Ainsi, pour éviter l’instabilité du lien matrimonial, le couple congolais doit maintenir un équilibre entre les obligations matrimoniales et le travail, voire les relations sociales. L’équilibre en toutes choses demeure très important. Ce constat a beaucoup d’impact négatif, surtout quand la femme occupe des hautes fonctions au niveau politique, de la magistrature, l’enseignement universitaire, ou dans une entreprise…
En effet, où sont allées ces femmes congolaises qui pouvaient se passer de tout, sauf consacrer du temps pour leurs enfants, préparer pour le mari? Où donc sont allées ces femmes congolaises qui prenaient ne fût-ce qu’un jour dans la semaine pour l’entretien de la maison, le suivi scolaire des enfants? Peut-on encore trouver au Congo ces femmes qui, pour le bien-être de leur mariage, se réveillaient parfois tôt pour donner un coup de main. Où sont-elles donc passées? Et pourtant, dans la plupart des cas, c’est la bonne qui gère. Alors, est-ce pour autant que dans la société congolaise on n’est plus en droit de rêver de femmes qui s’occupent de leurs foyers, sans que cela n’enlève rien à leur rang social? En agissant ainsi, elles posent un acte qui fait d’elles un miroir dans lequel elles peuvent se regarder et tirer des leçons.

Aspects juridiques
Vu sous l’aspect juridique, l’article 135 du Code congolais de la famille consacre le droit à la polygamie. Si la société traditionnelle africaine recourait à la polygamie, c’était pour parer aux travaux champêtres, à l’infertilité d’une femme en prenant une autre pour procréer. Mais de nos jours, elle est de moins en moins acceptée face à la crise économique et aux maux qui en découlent. Elle est vue comme générant «de la jalousie, de la compétition, des rivalités, de l’égoïsme, des règlements de compte directs ou par personnes interposées (les enfants surtout). Parfois, les coalitions ou triangles pervers y sont également observé(e)s et justifient les escalades symétriques entre les personnes: les enfants de deux ménages différents peuvent entrer en coalition contre ceux d’un troisième ménage, le père et les membres du deuxième ou troisième ménage peuvent entrer en coalition contre le premier ménage, etc.». (Leonard Nguimfack, «Conflits dans les familles polygames et souffrance familiale», Cahiers critiques de thérapie familiale et de pratiques de réseaux, 2014/2 (n° 53), p. 49-66.)
A l’instar de beaucoup d’autres auteurs qui revendiquent la révision de cette disposition légale, ici encore, la femme congolaise devrait lutter pour la promotion de la monogamie.
Beaucoup de forums et d’articles allant dans ce sens sont à promouvoir.(cf. par exemple la tribune pour une abrogation de la polygamie au Congo, du 19 octobre 2018). Dans le même ordre d’idées, le pape François, dans son exhortation, dénonce la polygamie parmi les défis qui rongent les unions légitimes: «On ne se rend plus clairement compte que seule l’union exclusive et indissoluble entre un homme et une femme remplit une fonction sociale pleine… Dans certaines sociétés subsiste encore la pratique de la polygamie…», souligne-t-il. (Amoris Laetitia, § 52). A l’instar de beaucoup d’autres auteurs qui revendiquent la révision de cette disposition légale, ici encore, la femme congolaise devrait lutter pour la promotion de la monogamie. Beaucoup de forums et d’articles allant dans ce sens sont à promouvoir.(cf. par exemple la tribune pour une abrogation de la polygamie au Congo, du 19 octobre 2018)

Vie de prière
A ces aspects précédents, on ne peut oublier d’ajouter la prière. La réussite du mariage et le maintien de ce lien passe par la prière. Dieu nécessite d’être mis au centre. Jésus lui-même dit: «Là où deux ou trois sont rassemblés en mon nom, je suis au milieu d’eux.» (Mt. 18,20). Et quand Jésus pénètre le cœur de tout lien matrimonial, il porte Lui-même le fardeau de leurs difficultés, tout en devenant la solution. Quand la conviction du couple s’inscrit dans la perspective selon laquelle c’est Dieu qui unit, devant les inévitables jours de tempête, les tentations, les vents violents auxquels toute famille peut faire face, la solution passe par le recours à Jésus. Et dans cette vision des choses, le Pape François dit: «La famille qui prie ensemble reste ensemble et irradie la paix. Une telle famille peut être un soutien particulier pour d’autres familles qui ne vivent pas en paix». (François, Irlande 2018)
Il est important, dans la pastorale, d’encourager les familles congolaises qui prient ensemble, tout en stimulant celles qui en ont perdu l’habitude de le faire. Une prière ensemble demeure toujours une force et un moment de grâce. Ici encore, la femme doit être active, doit stimuler sa famille à l’école de la prière. La femme doit habituer ses enfants à prier dans les moments de joie comme dans la souffrance. Combien de femmes chrétiennes qui, quand le torchon de leur maison brûle, quand le bon vin qui crée la joie dans la famille manque, préfèrent recourir aux voies maléfiques, plutôt qu’à Dieu ou au prêtre qui avait béni leur union?
Devant cette carence, le chemin à suivre est pourtant simple: accompagner Jésus au mariage de Cana. (Jn. 2,1-12: «Ils n’ont plus de vin; disons: ils n’ont plus d’amour, ils ne s’entendent plus, ils veulent briser ce lien matrimonial si précieux qui les unit. Puis s’en suivent une exhortation et un conseil gratuits: «Faites tout ce qu’il vous dira.» Ce qu’il dit conduit toujours à la solution aux problèmes, et a pour effet un exode: les aigris retrouvent le sourire, le lien familial brisé se fortifie, la volonté d’aimer renait et l’amour fait resplendir encore la joie d’être une famille.

Et la fête continua
Il est aussi vrai que le maintien de l’harmonie dépend de l’un et de l’autre conjoint dans le ménage. Un homme, avant de quitter cette terre, disait à sa fille: «Imite la vie de prière de ta mère. Car grâce à sa prière, mon foyer a été épargné de beaucoup de dangers». Et le Pape François dit: «La prière peut aider à reconnaître la beauté et l’importance de la famille, avec ses lumières et ses ombres.» Alors, femme congolaise, lève-toi, car le tissu familial, pour continuer à être éclatant, attirant et bien équilibré, dépend, en grande partie, de toi, de ton cœur de femme et de mère.

Sr Rhyta KIMANI, cp