Tribun brillant, arrivé au pouvoir en 1992 par les élections démocratiques post-Conférence nationale souveraine, après les épisodes sombres de la terreur monopartites, Pascal Lissouba fut un intellectuel, un scientifique hors pair, un homme politique paré d’une vision républicaine et panafricaine incontestable. Il a joué dans la société un rôle décisif qui a assuré véritablement le salut des Congolais et de la communauté internationale.

Premier Ministre (à 32 ans), en 1963, jusqu’à sa disparition hors de son pays, il défendit bec et ongles ses idées, pour l’installation du panafricanisme. Il redressa et préserva la République du Congo, longtemps plongée dans la crise politique et la perte de confiance, tant au plan national qu’international.
Cet homme providentiel (sans parti pris) que les différents acteurs politiques congolais et étrangers regrettent sincèrement aujourd’hui, après sa mort. Cette majesté combien salvatrice à su défendre les couleurs de la science (un nobélisé raté) et de la politique, afin de sortir l’Afrique du bégayement du développement socio-économique.
Dans sa philosophie, Pascal Lissouba a reformé l’Etat congolais mis en mal par les déchirements, les divisions ethno-tribales et les crises sans précédent. Il fut un génie pensant des institutions pour l’intérêt général. Un géant compatriote qui, sans préjugé ethnique aucun, a su préserver l’idée collective et l’honneur de la nation congolaise.
Pascal, ce prénom, et Lissouba, ce patronyme, nous renvoient à une belle allégorie de la République du Congo, laquelle illustre l’amour, l’instinct scientifique et la tolérance. Cet homme nous invite à ne point céder au désespoir. Car la seule existence de la République montre que, derrière les grandes figures, se cachent les exploits collectifs de héros anonymes. Les citoyens vertueux, dirait Victor Hugo, demeurent le secours ultime quand la tempête éclate.
Pascal Lissouba demeurera dans la mémoire et dans la conscience des Congolais, comme l’homme providentiel, face à la situation de dégradation économique qu’il a pu surmonter. Il restera ainsi le disciple de l’équilibre budgétaire obtenu grâce à l’adoption de nouveaux impôts, autrement dit, la taxe fiscalo-douanière, une entreprise à laquelle il a aussi aisément contribué.
Dans sa politique de bonne gouvernance, il envisagea que l’argent du pétrole serve à payer les dettes contractées pendant une décennie et demie par le régime précédent.
Il crut au développement de la République du Congo par l’initiative de la décentralisation pratique et non théorique ou verbale.
Pour Pascal Lissouba, la décentralisation serait le moyen le plus efficace et capital possible susceptible de mettre fin à l’intensification du tribalisme, souvent programmé et animé par les hommes politiques, en mal de gloire et au mépris du respect de la citoyenneté, qui n’est autre que, à écouter l’historien Dominique Ngoie-Ngalla, une exigence civique autant que morale. Elle est un ensemble de comportements destinés à construire avec les autres citoyens, des relations d’échanges, en vue de la formation de ce bien commun qu’on appelle la République.
Sauver la République, redonner l’espoir au chemin du développement et conserver l’idéal de l’union nationale, tel fut le bien-fondé du rôle joué par Pascal Lissouba. Mais la République ne semble pas lui devoir cette gratitude dévolue à une personnalité digne de son rang. Hormis le deuil organisé à Brazzaville et à Dolisie (capitale du Niari, son département natal), au siège de son parti, l’Union Panafricaine pour la Démocratie Sociale (UPADS), et au domicile de ses parents, rien d’autre n’a été fait au nom de la République, pour traduire en acte sa disparition, à commencer par le drapeau national non mis en berne, symbole de deuil national.
Adieu, l’épigone de Madiba!

Célestin Désiré NIAMA