La poliomyélite, anciennement connue, maladie de Heine-Medin ou paralysie infantile, est une maladie infectieuse aigue transmissible, essentiellement neurotrope, immunisant endémoépidémique, due à un poliovirus sauvage. Il existe trois types différents (PVS1, PVS2, PVS3).

Le poliovirus sauvage type 2 (PVS2) a été déclaré éradiqué en 2015 et PVS3 n’a pas plus jamais été détecté depuis 2012. Il reste donc à éradiquer le PVS1, mais aussi les PVDVc.
Le réservoir du virus est humain. La transmission se fait par voie féco-orale ou orale-orale (mains sales, eaux). L’infection est inapparente dans l’immense majorité des cas: 0,1 à 0,5% des sujets infectés développent des paralysies flasques consécutives à l’atteinte des neurones moteurs de la moelle épinière. La poliomyélite est mortelle quand les muscles respiratoires sont atteints (10% des cas). Le virus persiste dans les selles pendant plusieurs semaines. Elle atteint surtout les jeunes enfants entre 3 mois et 5 ans.
La maladie a une incubation de 7 à 10 jours (4-35 jours). La forme paralytique typique est de
diagnostic clinique, fièvre, fatigue, maux de tête, vomissements, raideur de la nuque, douleurs dans les membres.
La létalité est de 5 à 10% chez l’enfant, de 15 à 30% chez l’adolescent et l’adulte, surtout en cas d’atteinte bulbaire.
Aucun médicament antiviral spécifique n’est disponible contre la poliomyélite, d’où la prévention par la vaccination.
Avant la mise en place du Programme de vaccination (PEV) en 1974, il y avait 500 000 nouveaux cas de poliomyélite par an dans le monde. En 1988, l’Initiative Mondiale pour l’Eradication de la poliomyélite (IMEP) a été lancée par l’Assemblée Mondiale de la Santé (OMS), avec pour objectif l’éradication de la poliomyélite en 2005, éradication qui est reportée tous les ans.
L’année 2018 était avancée par l’Organisation Mondiale de la Santé pour l’éradication de la
poliomyélite. Mais en 2018, 33 cas confirmés de poliovirus sauvages (PVS) ont été confirmés dans le monde et en 2019, 176 cas.
En 2018, 104 cas de poliovirus dérivés d’une souche vaccinale (PVDVc) ont été confirmés dans le monde et 378 cas en 2019.
En 2020, 140 cas de PVS et 1039 cas de PVDVc ont été notifiés à l’OMS.
La poliomyélite n’est toujours pas en voie de disparition.
On distingue deux types de vaccins: vaccin polio inactivé type Salk (1955) administré par injection et uniquement disponible sous forme trivalente, et vaccin polio vivant atténué (VPO) type Sabin (1961) administré par voie orale en 2 à 3 doses.
Il existe un VPO trivalent (VPOt) contre type 1,2,3.
Le poliovirus sauvage de type 2 (PVS2) a été déclaré éradiqué en 2015 et le PVS3 n’a pas plus jamais été détecté depuis 2012. Il reste donc à éradiquer le PVS1, mais aussi les PVDVc.
Jusqu’en 2016, le programme d’éradication de la poliomyélite était basé sur l’emploi du VPO trivalent (VPOt).
Les trois stratégies du programme d’éradication de la poliomyélite (IMEP) 1988, et leurs résultats: 1)la vaccination systématique par le VPOt; 2) les activités de vaccination supplémentaire (AVS): ce sont les Journées Nationales de Vaccination; 3) la surveillance des virus par recensement et analyse virologique des cas de paralysie flasque aigue (PFA) par le réseau de laboratoires virologiques.
Les résultats de ces trois stratégies ont été spectaculaires.
Trois régions OMS avaient été certifiées exemptes de poliomyélite: Amérique, en 1994; Pacifique occidental (excluant la Chine), en 2000; Europe, en 2002. Puis, de 2003-2004, il y a eu résurgence de la poliomyélite due aux poliovirus sauvages à partir du réservoir d’endémie du Nigeria, six pays africains, au Yémen, Indonésie et, au total, il y a eu une baisse de l’incidence globale de la poliomyélite dans le monde depuis 2011. Mais le nombre des cas est en augmentation au Pakistan et en Afghanistan.
Au Nigeria, aucun cas n’a été décelé depuis 2014.
Le 25 août 2020, la Région africaine de l’OMS a été certifiée exempte de PVS. C’est la 5e des six Régions de l’OMS à obtenir cette certification. La Région de la Méditerranée orientale est désormais la seule ou persiste une circulation de PVS1, en Afghanistan et au Pakistan. Si l’éradication mondiale de la poliomyélite a reposé sur la vaccination par le VPOt, l’utilisation de ce vaccin est, après l’interruption de la transmission du poliovirus sauvage (PVS1), incompatible avec l’éradication, vu le risque de cas de poliomyélite dus aux poliovirus dérivés d’une souche vaccinale (PVDVc2).
En 2015, l’Assemble mondiale de la santé avait convenu que tous les Etats membres utilisant le
vaccin antipoliomyélitique oral devraient se préparer au retrait mondial de la composante de type 2 d’une dose de vaccin trivalent (VPOt). Une transition synchronisée du VPOt au VPOb (types 1 et 3) a été opérée dans tous les pays utilisant le VPO et s’est achevée le 1er mai 2016. Puis une dose unique de vaccin antipoliomyélitique injectable (VPI) a été introduite dans les programme de vaccination
systématique, afin de réduire les risques d’un déficit de l’immunité au poliovirus de type 2. Mais, en 2018, 42 millions d’enfants dans le monde n’ont pas reçu le VPI après la transition du VPOt au VPOb, faute d’approvisionnement.
De plus, des pays ont continué à utiliser le vaccin trivalent. Dans d’autres pays, des souches 2 vaccinales étaient déjà en circulation dans l’environnement avant le retrait. Ce qui a conduit à un nombre croissant d’épidémies liées à cette souche, d’autant plus que ces régions présentent des couvertures vaccinales faibles de PVS. En se servant d’un vaccin oral monovalent qui contient uniquement la souche 2, on réensemence l’environnement et crée de nouvelles épidémies.
Un nouveau vaccin qui contient uniquement la souche 2 (nVP02) a reçu l’autorisation d’utilisation en urgence de l’OMS. Il contient une souche modifiée génétiquement et présente un risque beaucoup plus faible de revenir à une forme virulente. On prévoit également d’ajouter une dose de vaccin inactivé injectable, synonyme de protection individuelle totale contre les trois souches.
La surveillance de la poliomyélite en 2021 fait appel à la surveillance de la paralysie flasque aigue (PFA) chez les enfants de moins de 15 ans. Elle repose sur l’analyse d’échantillons de selles à la recherche de PVS et de PVDVc dans des laboratoires agréés par l’OMS appartenant au Réseau mondial de laboratoires pour la poliomyélite (RMLP).
La surveillance de la PFA est complétée par une surveillance environnementale qui vise à détecter les poliovirus dans les eaux usées. Elle permet d’identifier la transmission éventuelle de poliovirus en l’absence de détection de cas de PFA.
L’analyse des séquences génomiques des poliovirus isolés permet d’étudier la transmission virale dans le temps et dans l’espace et d’identifier les lacunes éventuelles de la surveillance et l’émergence potentielle de PVDVc.
En 2020, 1039 cas de poliovirus dérivés d’une souche vaccinale (PVDVc)ont été notifiés dont 499 dans la Région africaine, notamment en Afrique centrale, y compris notre pays, le Congo, mais aussi d’autres cas en Malaisie, au Myanmar, aux Philippines et au Yémen.
Les épidémies de virus dérivés de la souche vaccinale sont essentiellement liées aux PVDV2c, éradiquée à l’état sauvage depuis 1999. Cette souche a été retirée officiellement des vaccins oraux en avril 2016.
L’éradication de la poliomyélite à l’échelle mondiale en 2023?
Cette nouvelle initiative mondiale pour l’éradication de la poliomyélite, le Plan stratégique pour l’éradication de la poliomyélite et la phase finale 2019-2023 repose sur 3 piliers: éradication, intégration et confinement ou certification 2020?
Mais, il faut d’abord éradiquer les PVS et les PVDVc2. En mai 2014, le Directeur général de l’OMS avait déclaré que la propagation du poliovirus constituait «une urgence de santé publique de préoccupation internationale». Cette déclaration est renouvelée depuis tous les 3 mois sur avis du Comité d’urgence concernant la propagation internationale du poliovirus institué au titre du Règlement Sanitaire International (RSI).
En mars 2020, avec la pandémie de la COVID-19, l’OMS a recommandé de reporter toutes les activités de vaccination supplémentaires (AVS) de riposte aux flambées épidémiques jusqu’en juin 2020 au moins et toutes les AVS préventives jusqu’au second semestre de 2020, avec une reprise de ces activités en fonction de la situation de la lutte contre la COVID-19. La reprise se fait attendre.
Ce qui risque de retarder encore l’éradication de la poliomyélite

Samuel NZINGOULA
Professeur émérite, pédiatre, président du Comité National des Experts de la Poliomyélite